« Qu'est-ce
donc que l'intuition d'un écrivain ? Mettons quelque aptitude à attendre une
synthèse en omettant toute analyse, de saisir et représenter synthétiquement, -
par des états d'âme, par des symboles, par des emblèmes, - ce que Machiavel
nommait "la vérité factuelle des choses". Est-ce bien tout ? Il faut
aussi une condition pour que cette aptitude s'exerce sur les événements
contemporains, sur la masse pesante de l'histoire quotidienne : et cette
condition, c'est l'indépendance, l'isolement, l'absence de tout lien avec
chaque forme de pouvoir constitué quel qu'il soit, l'indifférence à tout
chantage économique, idéologique, culturel, voire sentimental. »
(Sciascia)
« Il est
pour le moins piquant d’encourir le reproche d’utopie de la part de politiques
dont la carence mentale et imaginative a mené toutes les classes de la société
à un désespoir que n’a cessé d’accroître l’absurdité de leur système de
gestion. » (Vaneigem)
« Dans ces
conditions, le peuple, plutôt que se leurrer lui-même, avait développé une
technique étonnante : faire disparaître tout "moi" susceptible d'être
trompé. Aussi les jeunes gens, avec une apparence d'insensibilité stupéfiante,
ne montraient-ils pas la moindre douleur sur leur visage quand on leur
découpait une portion de derrière pour s'en faire une côtelette, habitués
qu'ils étaient à être traités comme des porcs. » (Mitsuharu Kaneko)
« Je ne
crois que les histoires dont les témoins se feraient égorger. » (Blaise
Pascal)
« Si
l’œuvre littéraire - fragment de société, de milieu ou d'expérience vécue -
doit être un processus, un miroir, le miroir projette son reflet sur le
processus et détermine du même coup son degré d'appartenance à la vie qui
l'entoure et à son atmosphère. » (Franz Jung)
« Ce qui se
voit aujourd'hui en plein, et que Günther Anders et Adorno avaient pour leur
part fait plus qu'entrevoir : l'obsolescence de l'amour et la mécanisation du
sexe. » (Eyguesier)
« Les
sociétés contemporaines tout entières ressemblent à un grand bordel triste et
sinistre : tout le monde y travaille et y consomme sans joie. Et tout le monde
paye, avec l’argent et sur sa peau, le prix. Sans avoir besoin d’être saints,
nos contemporains portent sur leurs visages les stigmates douloureux de leur
soumission. Chacun, dépaysé, promène son pauvre corps, réifié par tout ce qu’on
lui inflige, en arborant le cadavre de sa propre individualité crucifiée, comme
s’il était encerclé par une bulle transparente d’incommunicabilité hostile et
impénétrable, accompagné par une insurmontable méfiance de l’autre, par un
manque de curiosité sans limites, soutenue par une passivité inlassable, une
lâcheté active, dans un paysage de vulgarité et d’épouvante. »
(Sanguinetti)
« J'ai été
appelé étrange, excentrique, bizarre, fou, solitaire, insociable, misanthrope.
Il est sans doute bien vrai que je suis : étrange par rapport au banal,
excentrique par rapport au bourgeois, bizarre par rapport à l'ordinaire, fou
par rapport au cartésien, solitaire et sauvage par rapport au mouton,
misanthrope par rapport au philanthrope. Mais il ne me semble pas qu'on se soit
jamais demandé si j'étais tout cela parce que j'aimais l'être ou parce que la
bêtise, l'ignorance, la vulgarité, l'étroitesse d'esprit, le manque de goût, de
sensibilité et d'imagination des autres ne m'avaient pas laissé le choix. »
(Malkine)
« Que
pourraient bien attendre de l'expérience surréaliste ceux qui gardent quelque
soucis de la place qu'ils occuperont dans le monde ? » (Breton)
« Et quand
bien même l'on serait seul, au plus désolé de la solitude, c'est encore autrui,
la présence de l'autre, de tous les autres, qui étoffe notre vie. »
(Malaquais)
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