mardi 20 juin 2023

Carnet de citations : Société N°37


 

La composition organique du capital peut varier grandement d’une époque à l’autre et d’une région à l’autre, mais la tendance absolue est à l’épuisement de toutes les sources d’énergie, de manière soit additionnée, soit successive. Le capital n’a de préférence que pour la source d’énergie la moins coûteuse à tel moment de sa trajectoire historique. (…). Les énergies "vertes" sont le pur produit d'un capitalisme en bout de course essayant de se présenter comme "renouvelable" alors qu'il n'est rien d'autre qu'extractiviste et néocolonial. (Sandrine Aumercier)

Si la liberté renvoie logiquement et historiquement, même dans la pensée occidentale, à un idéal politique d’absence de domination, c’est-à-dire d’égalité, c’est l’inverse qu’il y a derrière l’idée de liberté moderne : une conception individuelle et même solipsiste qui, en définissant la liberté par l’élargissement des possibles et la délivrance à l’égard des nécessités de la vie, l’a associée à l’accroissement de la puissance, l’a fait reposer sur des formes de servitude plus ou moins déguisées. (...) . Affirmer que le développement industriel est émancipateur, c’est se payer de mots. Comme la technologie à laquelle il est lié, l’industrie (...) n’abolit pas les rapports de domination, elle permet juste de ne plus avoir à faire certaines choses et, en outre, elle permet d’en faire d’autres, c’est-à-dire qu’elle étend nos capacités d’action et, plus encore, celles des puissants qui nous gouvernent. Elle n’apporte pas la liberté, mais tout au plus le confort dans la soumission au système. (Aurélien Berlan)

TRAVAIL ABSTRAIT : De nos jours, la plupart des gens semblent paralysés par cette expression dont le sens est pourtant simple. Le "travail abstrait" désigne toute activité conduite pour l'argent, où le gain d'argent est le facteur décisif et où, par conséquent, la nature des tâches à effectuer devient relativement indifférente. (Robert Kurz)

Les fanfaronnades sur la diminution relative de la pauvreté absolue dans le monde ne parviennent plus à masquer l'expropriation accélérée de tous les moyens de subsistance des dernières populations qui étaient partiellement indépendantes de la logique marchande. Elles continuent à venir grossir de leur misère les agglomérations urbaines monstrueuses, à la recherche d'expédients de survie. C'est chaque parcelle de cette planète qui doit tomber aux mains du capital et fabriquer une humanité "élevée au biberon" du capital, c'est à dire privée des moyens de subvenir à ses propres besoins, utilisée puis rejetée comme simple déchet humain de la valorisation. (Aumercier)

Dans les régimes des partis improprement dits « démocratiques », le pouvoir politique, qui sur le papier appartient au peuple ou à la nation, est en réalité le pouvoir de l’État, organe qui le détient et l’exerce. Tout État s’appuie sur le monopole de la force et exerce son autorité en l’utilisant à sa guise. Dans la mesure où l’usage de la force – la répression – n’a pas de limites préalablement définies, le pouvoir, quand il est vraiment contesté, ne s’en donne donc aucune : l’État est autoritaire et policier. L’usage et l’abus sont indiscernables. À vrai dire, l’État réagit violemment lorsque des personnes désenchantées agissent de leur propre chef, c’est-à-dire non seulement l’ignorent, mais pis encore ne le reconnaissent pas. C’est le mal actuel de l’État : sa fragilité fait que tout acte de désobéissance est considéré comme un défi, car remettant en cause cette autorité que l’État cherche à restaurer par un usage pervers de la loi et un usage excessif et intimidant de la force. L’État n’existe qu’ainsi. (Miguel Amoros)

Dans la glorification du « travail », dans les infatigables discours sur la «bénédiction du travail », je vois la même arrière-pensée . Au fond, on sent aujourd’hui, à la vue du travail – on vise toujours sous ce nom le dur labeur du matin au soir – qu’un tel travail constitue la meilleure des polices, qu’il tient chacun en bride et s’entend à entraver puissamment le développement de la raison, des désirs, du goût de l’indépendance. Car il consume une extraordinaire quantité de force nerveuse, et la soustrait à la réflexion, à la méditation, à la rêverie … (Nietzsche)

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