jeudi 30 octobre 2014

Carnet de citations - Histoire/ Historiosophie 10




« Pancho Villa parlait comme s'il savait qu'il serait pendant une centaine d'années la cible d'amours populaires passionnées et haines bourgeoises enragées, le matériau magistral de romans qui ne seraient jamais écrits. » (Paco Ignacio Taibo II)

« La "réclame" se trouve au début d'une évolution (...).
Il est difficile d'écrire l'histoire de l'information en la séparant de celle de la corruption de la presse. » (Benjamin)

« Que peut-on appeler « totalitarisme », après avoir lu 1984 ? Non pas une organisation politique extérieure à nous et nous disculpant, mais bien plutôt ce piège dans lequel on nous isole individuellement et on nous invite à jouer le rôle de la victime pour nous faire renoncer à notre pouvoir. »  (Bourlier)

« Oui, cela fait bien longtemps que la domination s'invente des raisons d'être et d'effroi. Cela fait bien longtemps que la Terreur est imposée dès que l'affirmation d'une force de vie échappe à la neutralisation marchande et met en péril le capital. » (Bourlier)

« Ce que j’ai vu en Espagne ne m’a pas rendu cynique, mais me fait penser que notre avenir est assez sombre. » (Orwell)

« Lichtenberg représente parfaitement ce moment privilégié de l'histoire européenne où le mouvement des lumières parvient à maturité, quand la raison admet qu'elle n'est pas toute-puissante et se met à l'écoute de ce qui n'est pas elle. » (Lichtenberg)

« 30 avril 1871
Malgré́ tout ce tourment de tête et de compréhension d’affaires sociales auxquelles je n’étais pas habitué, je suis dans l’enchantement. Paris est un vrai paradis! Point de police, point de sottise, point d’exaction d’aucune façon, point de dispute. Paris va tout seul comme sur des roulettes. Il faudrait pouvoir rester toujours comme cela. En un mot, c’est un vrai ravissement. » (Gustave Courbet)

« Chaque nouvelle expédition guerrière augmentait sa communauté mendiante des "pauvres en esprit" depuis que les premiers bastions contre la barbarie étaient tombés, Vienne, Prague et l'Espagne en partie ravagée.
Dans cet écroulement de l'Occident et de sa morale judéo-chrétienne, de son esthétique hellénique, seul le titubant rêveur gardait l'équilibre, comme un matelot à bord du "bateau ivre" sait s'accoutumer au rythme marin. » (Walter Mehring)

« La révolte des Tuchins, l'une des jacqueries les plus longues, s'étendit de 1363 à 1384 et toucha l''Auvergne à partir de 1363, puis se propagea dans tout le Languedoc et s'intensifia entre 1381 et 1384. Le tuchinat (...) fut bien davantage qu'une simple jacquerie antitaxes, car il incarna la manifestation d'une solidarité villageoise et un réflexe de survie tentant de soustraire les biens de la communauté à la convoitise des pillards. Sa forme d'organisation révéla une prise de conscience de la nécessité de mettre en place une défense commune reposant sur des regroupements de communautés. Le tuchinat s'appuyait sur des liens de sociabilité qui sous-tendaient la vie communautaire des villages et sur une logique géographique et de voisinage. Les révoltés, qui ne se désignaient pas sous le vocable de Tuchins mais sous celui de companhos, sous-entendaient ainsi la permanence d'un lien social et l'existence d'un devoir d'entraide et étaient perçus ainsi par tous les membres des communautés concernées. » (Collectif)

CARNET DE CITATIONS Société 9


         

« Autrefois les braves gens étaient nombreux. Et même ceux qui ne l'étaient pas faisaient semblant de l'être, car c'était l'usage. De là provenaient l'hypocrisie et la fausseté, ces grands vices du passé, dénoncés par le réalisme critique de la fin du XIXème siècle. Le résultat de cette dénonciation furent inattendu : les braves gens disparurent. La bonté n'est pas uniquement une qualité innée : il faut la cultiver, et on ne le fait que si la nécessité s'en fait sentir. Pour nous, la bonté était une qualité démodée, disparue, et un brave homme s'apparentait à la famille des mammouths.
(...) Il fallait chercher la bonté et la bonhommie dans des endroits perdus, inaccessibles à l'appel du temps. » (Nadejda Mandelstam)

« Puis, très souvent, dans l'espoir d'absinthes payées sur les vieux gains des anciens bas, des capitaines retraités de toutes armes, ramassent et épousent ces fausses Madeleines, alors que leur maturité est devenue telle qu'en dépit même d'une sûre prébende, la grosse cavalerie s'effare ! » (Huysmans)

« Là où la seule expérience commune est la séparation, on n'entendra que le langage informe de la vie séparée. » (Comité invisible)

« Tous ceux qui arrivent à la richesse, à la puissance, vous les verrez y arriver par la fourbe et par la force; puis une fois qu'ils les ont usurpées ainsi par ruse et par violence, ils les décorent du nom de juste gain. » (Machiavel)


« Longtemps encore, il resta plongé dans ses pénibles méditations. Il sentait croître, maintenant, autour de lui, une solitude bizarre, comme si les hommes tourmentés avaient soudain déserté le monde. » (Albert Cossery)

« Notre objectivité est une affaire collective. Notre science n'est pas le savoir, mais une certaine socialisation du savoir, l'élaboration collective d'un corpus de moyens publics de connaissance. C'est ainsi qu'il nous appartient de la réaliser et d'en faire une œuvre d'enrichissement réel : remise à sa place, débarrassée de la prétention à être la seule voie de la vérité, à dicter la réalité et à dominer l'expérience humaine du monde. Il nous faut en outre reconnaître que c'est l'entière communauté humaine qui constitue la seule "communauté scientifique" véritable, et qu'aucune "objectivité" n'échappe à sa multiplicité ni à son histoire, inconstante, polémique, grotesque, inachevable, irréductible. Or, ce qu'on appelle de façon fallacieuse "la science" consiste à prétendre qu'il y a une seule réalité objective en progrès, qu'elle est uniquement le produit de professionnels et d'institutions spécialisées, et qu'elle n'appartient donc pas à la conscience commune, laquelle ne peut y prendre part qu'en se vidant de tout vécu singulier. » (Bourlier)

" Regardez autour de vous, toute cette terre mise à nu, toute cette eau rompue et empoisonnée, tous ces matériaux morts, massacrés, uniformisés, toutes ces lignes droites, toutes ces surfaces vides ! (...) Nous vivons à l'époque où le paradis marchand est réellement devenu le désert invivable qu'il a toujours tendu à être." (Bourlier)



dimanche 19 octobre 2014

La jeunesse ...

"Quant à la jeunesse, victime et successive, aujourd'hui seul levain d'une société plus pesante que jamais, je ne puis me dissimuler qu'elle est chaque fois destinée à vieillir, c'est à dire à s'appesantir à son tour. Il me revient cependant, recueillie presque par accident, comme une rumeur de ma propre adolescence, une phrase d'un auteur que j'ai peu fréquenté (Barrès, si je ne me trompe). Elle affirme que la jeunesse, passé trente ans, est le privilège de quelques natures royales. Ces rescapés exceptionnels d'un naufrage général m'apparaîtront toujours le sel et le génie du monde. D'instinct et de raison, je leur fais confiance. D'autre part, je sais, de bonne source, qu'ils doivent passer par le scandale. Je ne suis pas persuadé pour autant qu'il s'impose de parler de classes d'âge ni de conflits de génération. Elles se ressemblent toutes et, dans chacune, le nombre des recalés par la vie, plus sévère que les tristes examens, s'avère, hélas, considérable."  André Breton