samedi 29 mars 2014

CARNET DE CITATION -Psychologie, comportement humain 6



« Pour être un membre irréprochable parmi une communauté de moutons,
il faut avant toute chose être soi-même un mouton. » (Einstein)

« La frénésie de consommation des produits les plus récents de la technique, (...) fait accepter la camelote la plus éculée et jouer le jeu de la stupidité programmée. Ne jamais se demander à quoi sert un produit, faire comme tout le monde, participer à la bousculade, voilà qui vient remplacer tant bien que mal les besoins rationnels. » (Adorno)

« Celui qu'une logique trop conséquente rend incapable de donner, fait de lui-même une chose et se condamne à une froideur glacée. » (Adorno)

« Car la délicatesse entre les êtres n'est rien d'autre que la conscience que sont possibles des relations affranchies de finalités utilitaires. » (Adorno)

« L'entêtement est la liberté qui se fixe à une singularité et se tient au sein de la servitude. » (Hegel)

« La conscience de soi est essentiellement ce retour en soi-même à partir de l'être-autre. » (Hegel)

« Les animaux mêmes ne sont pas exclus de cette sagesse, mais se montrent plutôt profondément initiés à elle; car ils ne restent pas devant les choses sensibles comme si elles étaient en soi, mais ils désespèrent de cette réalité et dans l'absolue certitude de leur néant, ils les saisissent sans plus et les consomment. » (Hegel)

« Car la conscience est d'un coté conscience de l'objet, d'un autre conscience de soi-même. » (Hegel)

« Plusieurs projettent beaucoup, sans pouvoir se fixer à rien : une défiance sophistiquée les joue et les mène de projets en projets, qu'ils soupçonnent l'un après l'autre d'être trop mal assurés pour s'y arrêter. Ils ont sans doute de la pénétration; mais, irrésolus à l'heure même qu'ils pensent le mieux, ils flottent avec inquiétude entre le oui et le non; ils remettent un dessein à peine conçu, pour en former un autre, auquel ils ne s'attachent pas davantage. Tout se présente à eux en même temps sous deux faces différentes, dont l'une est pour leur dessein, et l'autre leur paraît contre : ils ne se détermineront point. Comme si l'esprit de l'homme ne devait jamais rien adopter sans une démonstration mathématique du succès. » (Gracian)

« L'affectation est positivement le contraste de la grandeur, parce qu'il y a toujours de la petitesse d'esprit dans celle-là, au lieu que, dans l'autre, il y a toujours de l'élévation, toute naturelle, et toute simple qu'elle est. » (Gracian)

« Il faut être psychanalyste pour comprendre que, si les femmes ont tant de boutons à leur tailleur, c'est qu'elles rêvent d'être pianos. » (de La Serna)

« J'ajouterai ici, que le véritable critère de "la santé" psychique me paraît quelque chose de tout à fait relatif qui ne peut se déterminer pour chaque individu qu'en fonction des données préalables de son adaptation individuelle. » (Gross)

«Il s’est constitué un monde de qualités sans homme, d’expériences vécues sans personne pour les vivre (…) La plupart des hommes commencent à tenir pour naïveté l’idée que l’essentiel, dans une expérience, soit de la faire soit même, et dans un acte, d’en être l’acteur. » (Musil) 

jeudi 27 mars 2014

Gondi, cardinal par défaut

Jean-François Paul de Gondi  Cardinal de Retz 1613-1679   

Le sort réservé au Cardinal de Retz dans la littérature française est assez étrange. Tout démontre en effet que Retz devrait y avoir une place majeure ainsi que dans notre histoire; un style et une langue admirables, un sens de l'observation des réalités de son temps hors du commun, une intelligence subtile, une grande culture (c'est lui par exemple qui fit traduire Gracian en français). 
A cela se rajoute le fait que l'on a affaire à un homme d'action, très engagé dans les troubles de son époque, qui grâce à sa position sociale avait ses entrées partout et était donc extrêmement bien informé. Par là-même, ses Mémoires sont un document de connaissance historique et sociologique d'une très grande valeur.
Retz est pourtant fort peu lu désormais et souvent mis à l'écart.
Cela tient, à mon avis, à son caractère plutôt inclassable et à sa personnalité improbable dans une perspective contemporaine.
Cardinal ne dissimulant guère son parfait athéisme, aristocrate tribun du peuple, joueur politique invétéré et agitateur passionné, Retz fit de sa vie un roman et une aventure et somme toute, tel était bien son ambition. Prêtez donc attention aux écrits de cet inclassable car il en vaut vraiment la peine.

                            Extraits choisis des Mémoires

                                            Tome 1



Dans le rang des qualités, la résolution marche de pair avec le jugement :

Je dis avec le jugement héroïque dont le principal usage est de distinguer l’extraordinaire de l’impossible.



…toutes les circonstances extraordinaires sont d’un merveilleux poids dans les révolutions populaires…



…Il fit si bien qu’il se trouva sur la tête de tout le monde dans le temps que tout  le monde croyait l’avoir encore à ses côtés.



 ( le clergé )  qui donne toujours l’exemple de la servitude, la prêchait aux autres sous le titre d’obéissance.




 (Mazarin à propos d’une vantardise de RETZ) «  Il s’en moqua et il avait raison ; mais il la remarqua, et il n’avait pas tort »




Les monarchies les plus établies et les monarques les plus autorisés ne se soutiennent que par l’assemblage des armes et des lois ; et cet assemblage est si nécessaire que les unes ne se peuvent maintenir sans les autres.



(Sur le caractère de Mazarin)  Il prévoyait assez bien le mal, parce qu’il avait souvent peur ; mais il n’y remédiait pas à proportion, parce qu’il  n’avait pas tant de prudence que de peur.



Ce qui cause l’assoupissement (dans les états qui souffrent) est la durée du mal, qui saisit l’imagination des hommes, et qui leur fait croire qu’il ne finira jamais.  Aussitôt qu’ils  trouvent jour à en  sortir, ce qui ne manque jamais lorsqu’il est venu jusqu ‘à un certain point ils sont si surpris, si aisés et si emportés, qu’ils passent tout d’un coup à l’autre extrémité et que bien loin de considérer les révolutions comme impossibles, ils les croient faciles ; et cette disposition toute seule est quelquefois capable de les faire. 

…L’on a plus de peine dans les partis à vivre avec ceux qui en sont qu’à agir contre ceux qui sont opposés.


( Dans un discours au Grand Condé à propos du peuple) « Ils en sont là : ils commencent eux-même à compter vos armées pour rien, et le malheur  est que leur force consiste dans leur  imagination ; et l’on peut dire avec vérité qu’à la différence de toutes les autres sortes de puissance, ils peuvent quand ils sont arrivés à un certain point, tout ce qu’ils croient pouvoir. »



Si cette femme eût eu autant de sincérité que d’esprit, de beauté, de douceur, et de vertu, elle eût été une merveille accomplie.



Il parla fort bien, mais il ne parla pas à propos ; il n’était plus temps de contester, il fallait plier. Mais j’ai observé que les gens faibles ne plient jamais quand ils le doivent.


Comme il avait été nourri dans les formes(…), tout ce qui était extraordinaire lui était suspect. Il n’y a guère de disposition plus dangereuse en ceux qui se rencontrent dans les affaires où les règles ordinaires n’ont plus de lieu.


Cet entêtement pour des bagatelles, joint à l’acharnement que l’on avait à ne point départir des formes, en des affaires qui y étaient directement opposées, me fit connaître de très bonne heure que les compagnies qui sont établies pour le repos ne peuvent jamais être propres au mouvement.


Une maxime qui devrait être très commune et qui est pourtant très rare : je n’ai jamais vu que lui  qui ne contestât  jamais ce qu’il ne croyait pas pouvoir obtenir.



( le vieux prince d’orange disait que)

Le moment où l’on recevait les plus grandes et les plus heureuses nouvelles était celui où il fallait redoubler son attention pour les petites.

 … les mesures qu’ils avaient cru prendre (…)  ayant manqué, ils se jetaient à corps perdu à l’autre extrémité, ce qui est le caractère de tous les hommes qui sont faibles.


L’un des plus grands défauts des hommes est qu’ils cherchent presque toujours dans les malheurs qui leur arrivent par leurs fautes, des excuses devant que d’y chercher des remèdes. 




 (j’ai observé mille fois qu’) il est aussi nécessaire  de choisir les mots dans les grandes affaires, qu’il est superflu de les affecter dans les petites.


 L’on doit hasarder le possible toutes les fois que l’on se sent en état de profiter même du manquement de succès. 



J’ai remarqué plusieurs fois que quand les hommes ont balancé longtemps à entreprendre quelque chose, par la crainte de n’y pas réussir, l’impression qui leur reste de cette crainte fait, pour l’ordinaire, qu’ils vont trop vite dans la conduite de leurs entreprises.