samedi 23 mars 2024

Carnet de citations : Psychologie/Inconscient N°19

Pourquoi parler, pourquoi employer dans l'acte de la parole les formes de la communication et du langage, sinon pour sortir d'un malaise, c'est-à-dire des intentions cachées ou avérées, défis et défiances, de sorte que l'acte de comprendre émerge d'une incompréhension, d'ailleurs jamais complètement exterminée ? Le dialogue vivant éclaircit un malentendu, sans lequel il n'y aurait d'ailleurs rien à dire, et qui fournit la "matière" (à la fois "matériau, émotions cachées, opinions mal révélées, symboles - et "matériel", mode d'emploi des mots, intentions, opérateurs intellectuels, démarches visibles, comportements manifestés) sur laquelle travaillent les sujets en situation de dialogue ? Où gît et se cache la racine du malentendu qui rend le dialogue à la fois indispensable et difficile, possible et souvent voué à l'échec ? Dans le langage d'abord, dans les mots employés et la façon de les employer, dans les symboles utilisés et les intentions utilisatrices. Et aussi dans les systèmes de référence, généralement peu explicités. (Lefebvre)

La souffrance, en tant qu'elle a une cause sociale, met d'autant plus en cause la domination qu'elle en expose l'arbitraire de manière flagrante et en pointe l'irrationalité. Elle est la preuve vécue que ce que l'on fait passer pour une organisation rationnelle de la société, fondée sur les lois immuables de l'économie, relève en réalité d'une irrationalité mythique que rien ne peut justifier en dernière instance. (Adorno)

Ce qu'il faut d'abord c'est instaurer l'action : les activités qui viennent rompre la rigidité artificielle des établissements classiques. D'autant plus que nous savons que dans et par cette structure classique des établissements, ce qu'on instaure c'est le silence à tous les niveaux, notamment en créant et facilitant de fragiles refuges dans le silence, dans le symptôme ou plutôt dans le silence des symptômes où les malades s'abritent sinon avec complaisance, du moins avec une attitude de compromission, si ce n'est pas avec une attitude de démission. (Tosquelles)

Témoigner du caractère radicalement humain des difficultés où les malades se trouvent pris, et surpris, et qui entraînent ainsi toute une succession d'exclusions des groupes sociaux auxquels ils appartiennent constitue peut-être une tâche "hygiénique" préalable, indispensable à tout traitement et à toute prévention de la folie.
Les hommes sains d'esprit, ou qui se croient tels, ne sont pas radicalement différents des malades. Ils utilisent aussi leurs mécanismes psychiques et les situations sociales pour essayer de s'en sortir le mieux possible. Ce qui se passe c'est que le plus souvent ces "sains d'esprit" ont encore plus peur que les autres de ces problématiques et qu'ils refusent d'en savoir quoi que ce soit. (Tosquelles)

Ceux qui avaient déjà choisi comme refuge l’enceinte de leur maison se sont retrouvés à assister à la célébration planétaire de leur credo. Le récit d’un danger qui plane au-dehors – alors qu’entre les quatre murs, « entre nous », on est en sécurité – a recueilli de nouveaux auditeurs. La claustrophilie est liée au plus-maternel : dans les deux cas, la maison est plus aimée que le social, le fermé plus que l’ouvert, le dedans plus que le dehors, les murs protecteurs plutôt que la curiosité à l’égard de ce qui est nouveau et différent. Plus-maternel et claustrophilie ont dicté l’agenda du monde pandémique. Alors que je m’apprêtais justement à écrire ce livre sur les effets mortels du plus-maternel par rapport à la polis, mettant en lumière sa menace sur l’humanisation future, on décrète la fermeture de la ville comme principale défense salvatrice ! Par plus-maternel, il faut entendre la forme sous laquelle une relation symbiotique, fusionnelle, se substitue à la fonction symbolique du soin : le cocooning sans fin et le contrôle féroce – les deux vont ensemble – à la place de la promotion de l’indépendance des enfants. (Laura Pigozzi)

Les us et coutumes d’une société sont tout aussi lisibles que peuvent l’être les symptômes d’un sujet : ils expriment le niveau d’humanité atteint et ses possibilités de transformation, qu’il s’agisse de l’individu ou du collectif. (Laura Pigozzi)


 

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