« Chaque forme de comique peut se retourner et dévoiler sa face sérieuse. Derrière les rires les plus tapageurs se dissimulent les larmes les plus âcres. Sous chaque plaisanterie s'entendent les gémissements d'un spectre. » (Soseki)
« Balaganov, je vois que vous êtes une poire. Ne vous fâchez pas. Je désire seulement vous montrer la place que vous occupez sous le soleil. » (Ilf et Petrov)
« Les écrivains exagèrent lorsqu'ils tuent les acteurs de leurs romans dans une catastrophe, un incendie ou un crime. Ils ne croient donc pas à la lente asphyxie des jours monotones. » (Lascano-Tegui)
« La pauvreté et le zèle sont les deux meules d’un moulin. Il est dangereux de faire le troisième dans cette sorte de sandwich. » (Bierce)
« Dans les livres français, il se familiarisa avec l'étonnante mécanique de l'amour. Il découvrit que les mystères étaient plus proches qu'il ne l'eut deviné. L'amour était un incessant et voluptueux combat, agrémenté de ruses et de trahisons; à en juger par une épigramme, il avait même ses invalides, lesquels passaient au service de Bacchus. Mais chez Barkov, l'amour était une sauvage empoignade, avec croche-pieds, cris et menaces, et les hommes qu'il harassait, pareils à des chevaux fourbus, tournaient en rond, plein de sueur et d'écume. » (Tynianov)
« LA PASSION CONSIDÉRÉE COMME COURSE DE CÔTE.
Barrabas, engagé,
déclara forfait.
Le starter Pilate, tirant son chronomètre à
eau ou clepsydre, (...) donna le départ.
Jésus démarra à
toute allure.
En ce temps-là, l’usage était (…) de
flageller au départ les sprinters cyclistes (…)
Le fouet est
à la fois un stimulant et un massage hygiénique. Donc Jésus, très
en forme, démarra, mais l’accident de pneu arriva tout de suite.
Un semis d’épines cribla tout le pourtour de sa roue avant.
(...)
Les deux larrons, qui s’entendaient comme en foire,
prirent de l’avance. (...)
Mais il convient que nous relations
préalablement les pelles. Et d’abord décrivons en quelques mots
la machine.
Le cadre est d’invention relativement récente.
C’est en 1890 que l’on vit les premières bicyclettes à cadre.
Auparavant, le corps de la machine se composait de deux tubes brasés
perpendiculairement l’un sur l’autre. C’est ce qu’on appelait
la bicyclette à corps droit ou à croix. Donc Jésus, après
l’accident de pneumatiques, monta la côte à pied, prenant sur son
épaule son cadre ou si l’on veut sa croix.
Des gravures du
temps reproduisent cette scène (…)
Ils représentèrent
Jésus les deux mains écartés sur son guidon, et notons à ce
propos que Jésus cyclait couché sur le dos, ce qui avait pour but
de diminuer la résistance de l’air.
(...) Nous abrégerons le
récit de la course elle-même, racontée tout au long dans des
ouvrages spéciaux, et exposée par la sculpture et la peinture dans
des monuments « ad hoc »
Dans la côte assez dure du
Golgotha, il y a quatorze virages. C’est au troisième que Jésus
ramassa la première pelle. Sa mère, aux tribunes s’alarma.
Le
bon entraîneur Simon de Cyrène porta sa machine. Jésus, quoique ne
portant rien, transpira, (…) une spectatrice lui essuya le
visage.
La seconde pelle eut lieu au septième virage, sur du
pavé gras. Jésus dérapa pour la troisième fois, sur un rail, au
onzième,
Les demis-mondaines d’Israël agitaient leurs
mouchoirs au huitième.
Le déplorable accident que l’on sait
se place au douzième virage. Jésus était à ce moment deadheat
avec les deux larrons. On sait aussi qu’il continua la course en
aviateur… mais ceci sort de notre sujet. (Jarry)
L'image est un dessin de Heinrich Kley
Merci pour ces joyeux épigrammes qui ne manqueront pas d'épicer ces fêtes de fin d'année.
RépondreSupprimerBons vins, bon vent et bon bout d'An, comme on disait chez les anciens.