Jean-François Paul de Gondi Cardinal de Retz 1613-1679
Le sort réservé au Cardinal de Retz dans la littérature française est assez
étrange. Tout démontre en effet que Retz devrait y avoir une place majeure ainsi que dans notre histoire; un style et
une langue admirables, un sens de l'observation des réalités de son
temps hors du commun, une intelligence subtile, une grande culture
(c'est lui par exemple qui fit traduire Gracian en français).
A cela se
rajoute le fait que l'on a affaire à un homme d'action, très engagé dans
les troubles de son époque, qui grâce à sa position sociale avait ses
entrées partout et était donc extrêmement bien informé. Par là-même, ses
Mémoires sont un document de connaissance historique et sociologique d'une très grande valeur.
Retz est pourtant fort peu lu désormais et souvent mis à l'écart.
Cela tient, à mon avis, à son caractère plutôt inclassable et à sa personnalité improbable dans une perspective contemporaine.
Cardinal ne dissimulant guère son parfait athéisme, aristocrate tribun du peuple, joueur politique invétéré et agitateur passionné, Retz fit de sa vie un roman et une aventure et somme toute, tel était bien son ambition. Prêtez donc attention aux écrits de cet inclassable car il en vaut vraiment la peine.
Retz est pourtant fort peu lu désormais et souvent mis à l'écart.
Cela tient, à mon avis, à son caractère plutôt inclassable et à sa personnalité improbable dans une perspective contemporaine.
Cardinal ne dissimulant guère son parfait athéisme, aristocrate tribun du peuple, joueur politique invétéré et agitateur passionné, Retz fit de sa vie un roman et une aventure et somme toute, tel était bien son ambition. Prêtez donc attention aux écrits de cet inclassable car il en vaut vraiment la peine.
Extraits choisis des Mémoires
Tome 1
Dans le rang des qualités, la résolution
marche de pair avec le jugement :
Je dis avec le jugement héroïque dont le
principal usage est de distinguer l’extraordinaire de l’impossible.
…toutes les circonstances extraordinaires sont d’un
merveilleux poids dans les révolutions populaires…
…Il fit si bien qu’il se trouva sur la tête de tout le
monde dans le temps que tout le monde
croyait l’avoir encore à ses côtés.
( le clergé ) qui donne toujours l’exemple de la servitude,
la prêchait aux autres sous le titre d’obéissance.
(Mazarin à propos d’une vantardise de RETZ)
« Il s’en moqua et il avait raison ; mais il la remarqua, et il
n’avait pas tort »
Les
monarchies les plus établies et les monarques les plus autorisés ne se
soutiennent que par l’assemblage des armes et des lois ; et cet assemblage
est si nécessaire que les unes ne se peuvent maintenir sans les autres.
(Sur
le caractère de Mazarin) Il prévoyait
assez bien le mal, parce qu’il avait souvent peur ; mais il n’y remédiait
pas à proportion, parce qu’il n’avait
pas tant de prudence que de peur.
Ce
qui cause l’assoupissement (dans les états qui souffrent) est la durée du mal,
qui saisit l’imagination des hommes, et qui leur fait croire qu’il ne finira
jamais. Aussitôt qu’ils trouvent jour à en sortir, ce qui ne manque jamais lorsqu’il est
venu jusqu ‘à un certain point ils sont si surpris, si aisés et si emportés,
qu’ils passent tout d’un coup à l’autre extrémité et que bien loin de
considérer les révolutions comme impossibles, ils les croient faciles ; et
cette disposition toute seule est quelquefois capable de les faire.
…L’on a plus de peine dans les partis à
vivre avec ceux qui en sont qu’à agir contre ceux qui sont opposés.
( Dans un discours au Grand Condé à propos
du peuple) « Ils en sont là : ils commencent eux-même à compter vos
armées pour rien, et le malheur est que
leur force consiste dans leur
imagination ; et l’on peut dire avec vérité qu’à la différence de
toutes les autres sortes de puissance, ils peuvent quand ils sont arrivés à un
certain point, tout ce qu’ils croient pouvoir. »
Si cette femme
eût eu autant de sincérité que d’esprit, de beauté, de douceur, et de vertu,
elle eût été une merveille accomplie.
Il parla fort bien, mais il ne parla pas à
propos ; il n’était plus temps de contester, il fallait plier. Mais j’ai
observé que les gens faibles ne plient jamais quand ils le doivent.
Comme il avait été nourri dans les formes(…), tout ce qui
était extraordinaire lui était suspect. Il n’y a guère de disposition plus
dangereuse en ceux qui se rencontrent dans les affaires où les règles
ordinaires n’ont plus de lieu.
Cet entêtement
pour des bagatelles, joint à l’acharnement que l’on avait à ne point départir
des formes, en des affaires qui y étaient directement opposées, me fit
connaître de très bonne heure que les compagnies qui sont établies pour le
repos ne peuvent jamais être propres au mouvement.
Une
maxime qui devrait être très commune et qui est pourtant très rare : je
n’ai jamais vu que lui qui ne
contestât jamais ce qu’il ne croyait pas
pouvoir obtenir.
( le vieux prince
d’orange disait que)
Le moment où l’on recevait les plus grandes et les plus
heureuses nouvelles était celui où il fallait redoubler son attention pour les
petites.
… les mesures qu’ils avaient cru prendre
(…) ayant manqué, ils se jetaient à
corps perdu à l’autre extrémité, ce qui est le caractère de tous les hommes qui
sont faibles.
L’un des plus grands défauts des hommes est
qu’ils cherchent presque toujours dans les malheurs qui leur arrivent par leurs
fautes, des excuses devant que d’y chercher des remèdes.
(j’ai observé mille fois qu’) il est aussi
nécessaire de choisir les mots dans les
grandes affaires, qu’il est superflu de les affecter dans les petites.
L’on doit hasarder le possible toutes les
fois que l’on se sent en état de profiter même du manquement de succès.
J’ai remarqué plusieurs fois que quand les hommes ont balancé longtemps
à entreprendre quelque chose, par la crainte de n’y pas réussir, l’impression
qui leur reste de cette crainte fait, pour l’ordinaire, qu’ils vont trop vite
dans la conduite de leurs entreprises.
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